En devançant à la pédale tous les autres favoris au sommet du célèbre Mur de Huy de la Flèche Wallonne, David Rebellin, 37 ans, a fermé le clapet à tous ceux qui le voyaient trop vieux pour espérer gagner cette année sur les classiques ardennaises. Considéré par beaucoup (dont moi, je l’assume !) avant sa victoire parmi les coureurs appartenant au passé, celui qui occupe la modeste équipe Continentale Pro Diquigiovanni vient de prouver qu’il n’en était rien, et qu’il n’était pas question pour lui de tirer sa révérence, comme Bettini l’a fait l’an passé.
Après Ivanov, vainqueur dimanche de l’Amstel Gold Race à 34 ans, c’est donc un autre « vieux briscard » qui s’est imposé sur la seconde classique du triplé ardennais. Comme quoi, la patience est toujours récompensée, même s’il est vrai que Rebellin n’était pas le plus à plaindre à propos de succès : il avait en effet réalisé l’exploit, il y a cinq ans, de remporter en coup sur coup l’Amstel, la Flèche et Liège ! Pour revenir à sa victoire d’hier, je crois qu’on peut féliciter l’italien : battre comme cela, à son âge, des coureurs comme Cunego, S.Sanchez ou encore A.Schleck -de près de 15 ans son cadet !-, cela témoigne d’un mental de fer et d’une grande motivation. Car, il faut le rappeler, la saison 2009 est quand même la 17eme de la carrière de Rebellin…à ce propos, vu comme cela, deux ans dans une carrière ça ne parait finalement pas grand chose (si vous voyez ce que je veux dire…) ! Enfin, encore faut-il tenir jusqu’à 37 ans, hein…
Valverde, lui, n’en est en tout cas pour l’instant qu’à sa huitième saison, ce qui est peu par rapport à Rebellin, mais pas si mal quand même ! Ah, qu’elles paraissent loin ses années Kelme, années qui pourraient pourtant le rattraper dans quelques semaines… En attendant l’échéance du 11 mai avec fébrilité (pour ses supporters) et avec confiance, du moins en apparence (pour l’intéressé), Alejandro tente cette semaine de briller sur les classiques ardennaises. Dimanche, à l’Amstel, il ne pouvait guère espérer quelque chose avec sa forme juste passable (comparé à celle de Cunego par exemple), mais hier, pour la première des « vraies » ardennaises, il était déjà un peu mieux (7e) au Mur de Huy. Finalement, la Caisse d’Epargne avait joué la carte de l’offensive pour Rodriguez, placé dans un groupe d’échappé qui comprenait d’autres coureurs dangereux (Kroon, Scarponi, et Pfannberger entre autres) et qui de ce fait fut repris à 3 km du but. Tant pis, il aura essayé. Restait alors la carte Valverde pour la GCE, ce dernier étant très bien placé dans le peloton dans les 5 derniers km et pouvant encore compter sur un coéquipier pour l’aider. A 2,5 km, Alejandro était en 6e position du peloton, à moins de 2 km il se trouvait à la troisième place, juste derrière son coéquipier (que je n’ai pu identifier), et à la flamme rouge, son coéquipier menait le peloton, avec Valverde dans sa roue. L’espagnol était donc on-ne-peut-mieux placé pour entamer l’ascension finale ! Quelques attaques au tout début de la montée, et voilà Alejandro replacé aux alentours de la huitième place, position qu’il occupera approximativement durant toute la montée –il fut en effet trop court pour pouvoir suivre les Cunego, Rebellin and co qui se disputaient la victoire. Au final, il arrive 7e, à 11 secondes du vainqueur. Incontestablement, sa moins bonne forme que ses rivaux s’est fait sentir, surtout quand on regarde le top 5 : derrière Rebellin sont arrivés successivement A.Schleck, Cunego, S.Sanchez et Evans, soit les grands favoris de la course !
Que dire de plus, mis à part que cette place n’est pas une grande surprise, puisqu’on s’y était préparé ? Cependant, si l’on pressentait déjà que l’espagnol n’allait pas gagner la course, on ne s’était pas véritablement aventuré sur le terrain des pronostics concernant sa place exacte (chose difficile puisqu’on ne pouvait deviner s’il allait être mieux qu’au Cauberg, où il n’était même pas rentré dans les 20 premiers) : sa 7e place est donc dans ce sens une assez bonne nouvelle. Elle prouve en effet qu’Alejandro, bien qu’un ton en-dessous des six coureurs qui l’ont devancé, n’est tout de même pas si mal, et fera bien parti des favoris de Liège/Bastogne/Liège, dans trois jours. Sur la Flèche, il a été meilleur qu’à l’Amstel (même si la distance n’est pas la même) ; en suivant la logique, on devrait donc le voir encore meilleur à Liège, puisqu’il aura encore plus de kilomètres dans les jambes.
Cependant, restons tout de même réaliste. Certes, Alejandro a gagné par deux fois la « Doyenne » (dont c’est d’ailleurs le vainqueur sortant), certes c’est sa course, la grande classique qui lui convient le mieux puisqu’il peut battre ses adversaires au sprint après la montée finale (il y a un replat avant la ligne, au contraire de l’Amstel), mais cette année, c’est différent : d’abord, donc, Valverde n’a pas la forme d’un Cunego ou d’un A.Schleck (dont il faudra se méfier !), mais cela, c’était également le cas l’an passé, quoique probablement à un (ou deux) degré moindre. En fait, j’insiste surtout sur la raison suivante : ses adversaires seront encore plus prudent que l’an passé, et feront tout ce qui est en leur pouvoir pour éviter un sprint en compagnie du murcian, sprint où l’issue était inévitable. Cunego, l’an passé, s’était retrouvé piégé derrière ; je pense que cela ne se reproduira pas cette année. Et avec celui que je me plais à appeler le penchant italien de Valverde, il me semble compromis d’espérer attendre un sprint… De même pour A.Schleck, qui s’il en a les moyens, fera tout pour éviter le scénario de 2008, où son frère avait été battu au sprint par Valverde. De toute façon, de manière plus générale, aucun coureur n’a intérêt à arriver en compagnie d’Alejandro. Qui, lui, vous l’aurez compris, n’y voit par contre pas d’inconvénients.
Réaction d'Alejandro :
"Je crois que remporter la Flèche Wallonne aujourd’hui ne relevait pas totalement de l’impossible, mais il m’est arrivé à peu près la même chose que l’année dernière: étant mal placé, j’ai du remonter plusieurs fois vers l’avant et dans une course comme celle-ci, avec des adversaires qui sont à cent pour cent et qui se sont préparés spécifiquement pour les classiques, ces efforts finissent par se payer. La course a été très rapide, c’est vrai, mais malgré cela il y avait encore un groupe de 80 coureurs au pied de la troisième et dernière ascension du Mur de Huy, ce qui compliquait beaucoup les choses. Dans ce dernier kilomètre, je ne me suis pas senti mal et j’ai monté très régulièrement pour finalement prendre la septième place.
Je me suis senti beaucoup mieux qu'à l'Amstel, ce qui est bon signe pour Liège-Bastogne-Liège qui est un peu ''ma'' course, celle qui me convient le mieux. Dimanche, ça n'aura rien à voir avec aujourd'hui." a déclaré Valverde.
Classement :
1. Davide Rebellin (ITA, Serramenti PVC Diquigiovanni-Androni Giocattoli) en 4h42'15"
2. Andy Schleck (LUX, Team Saxo Bank) à 2 sec.
3. Damiano Cunego (ITA, Lampre-NGC) m.t.
4. Samuel Sanchez (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 7 sec.
5. Cadel Evans (AUS, Silence-Lotto) m.t.
6. Thomas Lövkvist (SUE, Team Columbia-High Road) m.t.
7. Alejandro Valverde (ESP, Caisse d'Epargne) à 11 sec. 8. Simon Gerrans (AUS, Cervelo TestTeam) m.t.
9. Michael Albasini (SUI, Team Columbia-High Road) m.t.
10. Rinaldo Nocentini (ITA, Ag2r La Mondiale) à 15 sec.
Photo : Alejandro hier au Mur de Huy